Les revenants
Nous nous y attendions, évidemment. Voilà dix ans que nous avons installé un composteur dans le jardin, en plastique noir, et nous avions vu un peu grand : en dix ans, il n'a jamais été rempli plus qu'aux deux tiers. Comme il était haut, je n'ai jamais pu mélanger son contenu. Je ne réussissais plus à le vider non plus car les trappes en bas étaient bloquées sous le poids de la terre. Parmi nos projets pour le jardin (installer un hôtel à insectes, scarifier efficacement la pelouse, refaire le massif sous le bouleau…), il y avait la construction d'un composteur en bois. Et puis dans le journal de l'agglomération, en octobre, est paru un article sur l'écologie, mentionnant que les habitants de certaines communes pouvaient recevoir deux poules (pas nous) ou que la communauté d'agglomération fournirait des composteurs aux familles volontaires, pour un prix réduit (mais lequel ? impossible de savoir), dans le but de réduire de 700 tonnes par an la collecte d'ordures ménagères (ils sont optimistes !). La pêche aux informations a été laborieuse : 4 semaines plus tard, mon mail était resté sans réponse, le numéro de téléphone indiqué était erroné, j'ai fini par trouver le service concerné, laisser un message. Enfin, mi-décembre, j'ai passé commande. Puis j'ai reçu un mail m'invitant à m'inscrire à une réunion d'information, suivie de la remise des composteurs, le formulaire d'inscription ne fonctionnait pas, j'ai rappelé, laissé un message… et le 20 janvier, Paul m'accompagnait pour emporter le colis (35 kg).
Ce dimanche sans pluie était idéal pour procéder à l'installation. D'abord, il a fallu démonter l'ancien meuble (qui sera récupéré par une Amapienne), les vis ayant rouillé, ça n'a pas été facile. Et puis procéder au vidage, en séparant les couches. Nous avons pu remarquer que les sacs ou emballages dit "compostables" le sont peut-être, mais à l'échelle industrielle. Qu'il faut éviter les pelures d'avocat, trop dures, que les coquilles d'œufs (que je ne mets plus au compost depuis des années) sont très bien conservées, tout au fond (les vers ont fait du rangement), que le moindre petit lien en plastique, la moindre étiquette ressortent intacts, que les côtés (plus aérés), sont remplis de bonne terre alors que le centre est plus lent à se décomposer (d'où la nécessité de remuer de temps en temps — une fois par mois, nous a-t-on dit). Le compost mûr a été déposé au pied des rosiers, sur l'emplacement du potager et dans les bacs. Paul a bien ratissé le sol pour le niveller, puis nous avons installé le nouveau bac et l'avons re-rempli. Deux heures, ça nous a pris, pour finir juste avant la pluie (pas prévue).
« Commencez par une couche de feuilles mortes » disait la consigne. Bien, dans ce cas, une distribution en février-mars n'est peut-être pas une très bonne idée ? J'ai tout de même retrouvé quelques paquets de feuilles mortes dans les coins (je ne les avais pas assez mélangées), nous avons ajouté des boîtes à œufs déchiquetées, alterné soigneusement les couches de "presque terre" avec les "plus sèches" ou les épluchures récentes, un peu de carton aussi. Le nouveau composteur est rempli presque aux 3/4, mais j'ai bon espoir qu'il fonctionne un peu plus vite que l'ancien (ceci dit, il n'y avait pas d'odeur suspecte non plus).
Et pourquoi les revenants ? Mais c'est évident :
Et pourtant, je suis souvent allée repêcher des couteaux quelques jours après leur disparition ! Inventaire du butin : 3 couteaux, 2 économes, 3 cuillères et une bouteille de bière (mystère ? Elle n'était pas cachée dans des épluchures, quand même ! L'explication la plus plausible est qu'un étourdi l'a déposée dans la poubelle à compost au lieu du bac à verre rangé juste à côté au garage). Et rien n'a rouillé.
Malgré tout, je ne pense pas avoir encore trouvé le trou noir qui fait disparaître petites cuillères, tasses, chaussettes ou autres…
La bâche a été étalée sur la pelouse afin d'être lavée par la pluie. Gribouille, le chat des voisins, est fort intrigué… il s'approche d'un air surpris, fait le tour de cette chose bleue suspecte, jette un œil vers la maison, n'ose pas y poser une patte.